Enjeux

Rechercher

NOUS TRAÇONS LA VOIE AU DÉVELOPPEMENT DURABLE

NOTRE PROCESSUS

Notre processus aide le Canada à trouver des solutions de développement durable intégrant les considérations environnementales et économiques afin d'assurer la prospérité et le bien-être de notre nation.

EXPLORER

We rigorously research and conduct high quality analysis on issues of sustainable development. Our thinking is original and thought provoking.

RASSEMBLER

We convene opinion leaders and experts from across Canada around our table to share their knowledge and diverse perspectives. We stimulate debate and integrate polarities. We create a context for possibilities to emerge.

CONSEILLER

We generate ideas and provide realistic solutions to advise governments, Parliament and Canadians. We proceed with resolve and optimism to bring Canada’s economy and environment closer together.

Hydro-Québec – Étude de cas


FACE AUX ÉLÉMENTS : Renforcer la résilience des entreprises au changement climatique

 

« Les économies du Nord sont principalement tributaires de leurs ressources naturelles et des services publics. Leurs vastes ressources inexploitées et les nouvelles possibilités économiques qui seront créées par le changement climatique pourraient faire du Nord l’une des économies canadiennes ayant la plus forte croissance. »

– T. Vandal, président-directeur général, 2009

couverture

télécharger le rapport

UN APERÇU //

Siège :

Montréal, Québec

Secteur:

Services publics

Nombre d’employés (en 2010) :

23 259 (y compris le personnel temporaire)

Revenus (2010) :

12,34 milliards CAD

Principaux déclencheurs de l’adaptation

Relation intrinsèque entre la production d’hydroélectricité et les facteurs climatiques

Obligation actuelle de gérer les risques climatiques

Épisodes récents de conditions climatiques extrêmes et coûteuses

Demande du gouvernement de clarifier les effets du changement climatique et les mesures d’adaptation

Mesures d’adaptation au changement climatique

Mise sur pied, en collaboration avec le gouvernement, d’un consortium de recherche spécialisé

Identification des secteurs d’activité sensibles au changement climatique

Établissement de scénarios de changement climatique en collaboration avec des experts

Évaluation des effets sur le ruissellement, la demande d’électricité et l’environnement

Avantages opérationnels

Des coûts considérables liés au changement climatique sont évités, bien qu’ils n’aient pas été quantifiés

Obstacles opérationnels

Difficulté de quantifier les avantages

Obstacles aux mesures d’adaptation pour les eaux transfrontalières


PROFIL DE L’ENTREPRISE //

MONTRÉAL, QUÉBEC
www.hydroquebec.com
Les centrales hydroélectriques de la série Manic 2 (crédit photo : Hydro-Québec)

   Les centrales hydroélectriques de la
   série Manic 2 (crédit photo : Hydro-Québec)

Hydro-Québec est l’une des plus grandes entreprises de production, de transport et de distribution d’électricité en Amérique du Nord. L’entreprise possède une capacité de production d’électricité totale de 36 671 MW (dont plus de 90 % provient d’installations hydroélectriques), et le plus vaste réseau de transport d’électricité des États-Unis et du Canada.

Hydro-Québec fournit de l’électricité au Québec où il a la responsabilité d’assurer un service fiable et continu. Il vend sa production excédentaire à d’autres fournisseurs dans le nord-est du Canada et des États-Unis, et achète de l’électricité auprès d’autres fournisseurs pour répondre à la demande dans les périodes de pointe. L’entreprise a conclu des partenariats avec d’autres producteurs d’énergie au Québec, comme Alcoa et Rio Tinto Alcan, qui achètent ou vendent de l’électricité à Hydro-Québec en fonction de leur production saisonnière. La vente et l’achat de l’électricité excédentaire sont rendus possibles grâce à 17 interconnexions avec les réseaux électriques de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick et du nord-est des États-Unis.

Hydro-Québec possède et gère 59 centrales hydroélectriques, 26 grands réservoirs, 571 barrages, 4 centrales thermiques et 1 centrale nucléaire, ainsi que 33 453 km de lignes électriques et 514 postes.

L’HYDROÉLECTRICITÉ ET LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

L’effet du changement climatique sur les services publics d’électricité dépendra des actifs à risque et de leur emplacement. Par exemple, la production hydroélectrique est susceptible d’être plus vulnérable au changement climatique que la production d’énergie thermique. Les biens situés le long des zones côtières peuvent être vulnérables à l’élévation du niveau de la mer, et ceux qui dépendent des rivières alimentées par des glaciers seront affectés par leur fonte précoce et plus rapide. Les installations situées dans le nord du Canada pourraient être affectées par la dégradation du pergélisol, causée par la hausse des températures. Plusieurs éléments de planification, de conception et d’exploitation des actifs électriques sont sensibles au changement des conditions météorologiques normales ou extrêmes :

// La production d’électricité renouvelable dépend directement de facteurs climatiques (comme le vent ou le rayonnement solaire) ou de la disponibilité des ressources naturelles (comme le ruissellement de surface).

// L’approvisionnement en charbon, pétrole, gaz ou uranium dans les centrales thermoélectriques ou nucléaires pourrait aussi être affecté par les changements climatiques aux stades de l’extraction ou du transport (par exemple, à cause de la quantité limitée d’eau ou de l’interruption de la chaîne d’approvisionnement lors de tempêtes).

// La production hydroélectrique est directement affectée par les précipitations saisonnières, la température, la fonte des glaciers et de la neige. Pour les centrales hydroélectriques, les pluies torrentielles augmentent le risque de débordement ou de rupture de barrage. Les centrales thermiques peuvent enregistrer une baisse de leur rendement optimal en raison du changement climatique, étant donné son incidence sur l’efficacité opérationnelle ou la température de l’eau de refroidissement.

// Les actifs de transport et de distribution (lignes électriques, pylônes ou poteaux, postes, etc.) sont vulnérables au changement climatique, car ce dernier peut accroître, par exemple, le risque de dommages aux lignes.

// Enfin, l’augmentation des températures et la fluctuation des précipitations auront une incidence sur la demande d’électricité pour le chauffage et la climatisation, modifiant ainsi les charges de pointe.

DÉCLENCHEURS

Hydro-Québec reconnaît que la bonne gestion des risques climatiques est un élément clé du succès de l’entreprise, car 97 % de sa production d’électricité provient de l’hydroélectricité, et l’entreprise gère déjà des débits d’eau très variables dans ses réservoirs.12

L’entreprise a reconnu l’importance de la gestion des risques climatiques dans les années 1980 en raison de quelques incidents causés par de faibles débits. Hydro-Québec a commandé des études pour déterminer si ces événements étaient dus à un cycle climatique naturel ou à d’autres causes. À l’époque, l’entreprise a examiné des mesures de gestion spéciales, en plus d’améliorer la gestion des réservoirs, en se dotant notamment d’un fonds de garantie partagé par différents services publics et d’une couverture d’assurance spéciale.

Ces dernières années, un certain nombre de catastrophes climatiques coûteuses ont fait ressortir davantage les risques climatiques pour la production, le transport et la distribution d’électricité.

// Du 19 au 20 juillet 1996, de fortes pluies dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean au Québec ont causé de graves inondations. Les eaux de crue ont débordé d’un certain nombre de barrages, ce qui a aggravé les effets de l’inondation.13 Hydro-Québec a été obligée de déverser l’eau de certains de ses réservoirs afin de préserver l’intégrité de ses barrages. L’entreprise a estimé les coûts de réparation de son réseau de transport et de distribution à environ 10 millions de dollars.14

// En janvier 1998, la pluie verglaçante a entraîné des accumulations de glace de plus de 80 mm dans certaines régions du Québec et de l’Ontario.15 La tempête de verglas a causé des pannes importantes, et plus de 1,6 million de personnes au Canada ont manqué d’électricité.16 Le réseau de transport et de distribution a subi une panne en raison du poids excessif de la glace sur les lignes électriques, les structures de soutien (poteaux et pylônes) et les branches des arbres à proximité. Plus de 3 000 km du réseau d’Hydro-Québec ont été endommagés par la tempête, et 24 000 poteaux, 4 000 transformateurs et 1 000 pylônes en acier ont dû être réparés. La tempête de verglas a coûté 725 millions de dollars à Hydro-Québec en 1998. L’entreprise a investi plus de 1 milliard de dollars au cours des années suivantes pour renforcer son réseau de transport et de distribution en prévision d’événements semblables.17

// De 2001 à 2004, des temps secs et la réduction des niveaux d’eau dans les réservoirs d’Hydro-Québec ont créé une crainte au sujet des déficits de production à long terme.18

Enfin, le gouvernement du Québec a soulevé des questions et demandé à Hydro-Québec de considérer les effets du changement climatique dans la planification des projets.c

ÉTABLISSEMENT DE PARTENARIATS STRATÉGIQUES POUR ACCROÎTRE LA RECHERCHE ET LA CAPACITÉ DE PLANIFICATION

En 2002, l’Institut de recherche d’Hydro-Québec (IREQ) a élaboré un programme de recherche pour mieux comprendre les changements climatiques et ses répercussions sur les entreprises, et élaborer des mesures d’adaptation technologiques à moyen et long terme afin de gérer les risques et exploiter les possibilités qui en découlent.

En réaction à une série d’événements météorologiques coûteux (les inondations de 1996 au Saguenay- Lac-Saint-Jean, la tempête de verglas de 1998 et les conditions de sécheresse), Hydro-Québec et le gouvernement du Québec ont uni leurs efforts afin de créer un consortium unique ayant le mandat d’étudier le climat régional, les effets du changement climatique et les solutions d’adaptation. L’organisme, appelé Ouranos (Consortium sur la climatologie régionale et l’adaptation aux changements climatiques), est en partie financé par Hydro-Québec. Dans le cadre d’Ouranos, Hydro-Québec collabore avec Rio Tinto Alcan, Ontario Power Generation (OPG) et Hydro-Manitoba sur les risques climatiques et les questions d’adaptation.

Depuis 2002, Hydro-Québec a élaboré un plan de travail exhaustif pour lutter contre le changement climatique, qui comprend les éléments suivants :

// Cerner les secteurs d’activité qui sont sensibles au changement climatique. Hydro-Québec a consulté le personnel des différentes divisions afin d’évaluer la sensibilité au changement climatique. Elle a identifié plusieurs secteurs sensibles et priorisé ceux où des travaux complémentaires étaient nécessaires : par exemple, Hydro-Québec a décidé que l’évaluation des effets du changement climatique sur les ressources en eau était une priorité.

La figure 2 présente ces secteurs sensibles.

Activités d’Hydro-Québec sensibles au changement climatique (températures, précipitations, vent et événements météorologiques extrêmes).

// Prévoir le changement des conditions météorologiques normales et extrêmes. Grâce à la collaboration avec Ouranos, Hydro-Québec a contribué à l’élaboration de scénarios de changement climatique qui peuvent être utilisés pour modéliser les répercussions sur les entreprises.

// Analyser les conséquences du changement climatique sur des activités ciblées. Hydro-Québec a utilisé des scénarios de changement climatique pour modéliser les répercussions sur les différents secteurs de l’entreprise, en collaboration avec le personnel des divisions Production, Distribution et Équipement.

// Élaborer des stratégies d’adaptation pour les activités d’Hydro-Québec vulnérables au changement climatique. Hydro-Québec veut comprendre les conséquences d’un changement du mode d’exploitation des actifs hydroélectriques sur la production future d’électricité dans un contexte de changement climatique. Au cours des prochaines années, Hydro-Québec verra à intégrer la gestion des risques climatiques dans ses activités de planification, de conception et d’exploitation.

Plusieurs réalisations importantes procèdent des travaux d’Hydro-Québec sur les effets du changement climatique et les mesures d’adaptation. Premièrement, l’entreprise a produit un grand nombre de projections sur le ruissellement fondées sur différents scénarios de changement climatique pour chacune de ses opérations hydroélectriques. Malgré la grande incertitude des modèles climatiques, les résultats indiquent une augmentation générale du ruissellement d’ici 2050, avec une augmentation plus importante dans le nord-est que dans le sud-est. Les résultats ont également indiqué une augmentation du ruissellement hivernal et une diminution du ruissellement estival en raison de l’augmentation des pluies par rapport à la neige l’hiver et du taux plus élevé d’évaporation l’été. Par ailleurs, les rivières auront des débits élevés plus tôt au printemps en raison de la hausse des températures alors que le débit maximal des rivières sera moins élevé en moyenne dû à la diminution de la neige en hiver. Hydro-Québec a prévu d’autres améliorations à ses modèles hydroclimatiques; par exemple, il prévoit analyser le débit d’eau et l’équilibre hydrique dans les marais et les tourbières du Canada.

La division Équipement d’Hydro-Québec a utilisé des scénarios de changement climatique pour évaluer les répercussions sur les conditions hydrologiques du projet Eastmain-1-A – Dérivation Rupert. Les résultats ont été présentés lors d’une audience publique pour répondre aux questions du public sur les effets combinés du changement climatique sur les pêches.19

En travaillant avec la division Distribution, l’équipe d’Hydro-Québec sur le changement climatique a intégré en 2008 les projections de température dans les prévisions de demande d’électricité. L’augmentation prévue de la température moyenne réduirait les besoins énergétiques de près de 1 TWh (0,5 % de baisse) par an en raison de la réduction des besoins de chauffage. Par ailleurs, Hydro-Québec prévoit une réduction de 350 MW des charges de pointe (1,0 % de baisse) en utilisant l’information sur les changements climatiques prévus. Ces prévisions d’une réduction de la demande d’électricité ont été intégrées à l’établissement des tarifs annuels d’Hydro-Québec ainsi qu’à son plan d’approvisionnement pour 10 ans, qui ont tous deux été approuvés par l’autorité de réglementation du Québec. Les résultats ont montré qu’en 2050, des économies de 2 TWh par an pourraient être enregistrées dans tous les secteurs en raison de la réduction des besoins de chauffage.d

Hydro-Québec a utilisé des projections de ruissellement pour évaluer les impacts environnementaux du développement hydroélectrique de la rivière Romaine et envisager des stratégies de gestion adaptative permettant de faire face aux différents scénarios possibles.e Cette approche a été approuvée par l’Agence canadienne d’évaluation environnementale dans un rapport d’avril 2008.20

Enfin, Hydro-Québec a analysé les avantages d’adapter le mode d’exploitation des réservoirs hydroélectriques à l’évolution des régimes hydrologiques. Une étude de cas a permis à l’entreprise de constater qu’en 2050, sans mesure d’adaptation, la production d’électricité pourrait diminuer jusqu’à 14 % en raison de l’augmentation des déversements improductifs par rapport à la période de référence. Cependant, l’adaptation du mode d’exploitation pourrait prévenir les pertes de production et même augmenter la production de près de 15 %.21

GESTION DE L’INCERTITUDE CLIMATIQUE

Pour augmenter le niveau de confiance de ses projections, Hydro-Québec a évalué la sensibilité de ses simulations hydroclimatiques à différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre (GES), modèles climatiques, modèles hydrologiques et méthodes pour l’étude d’impact. Cette approche utilisant plusieurs méthodes d’analyse a montré que le choix d’un modèle climatique influence davantage les simulations hydroclimatiques que le choix d’un scénario d’émissions de GES ou d’un modèle hydrologique (pour l’horizon 2050).

Hydro-Québec a par conséquent révisé ses projections de ruissellement pour tous les bassins versants dans sa zone de service, en s’appuyant sur une combinaison de modèles climatiques et hydrologiques et de scénarios d’émissions de GES. Les résultats de ce travail sont présentés à la Figure 3.

Scénarios de ruissellement, les projections étant basées sur une combinaison de scénarios climatiques et d’émissions de GES

AVANTAGES ET ENJEUX

Bien qu’il soit difficile de quantifier les avantages économiques de l’évaluation des impacts climatiques et de l’adoption de mesures d’adaptation, Hydro-Québec les trouve considérables et estime que certains ont déjà été réalisés grâce à l’intégration des connaissances sur les effets du changement climatique et l’adaptation des activités de planification, de conception et d’exploitation, notamment dans les divisions Équipement et Distribution. Ce point de vue justifie les sommes importantes qu’Hydro-Québec a investies dans la recherche sur le changement climatique et ses répercussions sur les entreprises et sur les mesures d’adaptation depuis 2001.

POINT DE VUE SUR LE RÔLE DU GOUVERNEMENT

Le gouvernement du Québec a joué un rôle central dans l’adaptation d’Hydro-Québec au changement climatique en participant au financement d’Ouranos. Le gouvernement fédéral a aussi contribué indirectement en soutenant la recherche universitaire pertinente aux projets ou aux opérations d’Hydro-Québec.f

Pour poursuivre sa stratégie d’adaptation, Hydro-Québec estime que l’intervention du gouvernement est nécessaire en ce qui a trait à la gestion des eaux transfrontalières (entre les provinces canadiennes et entre le Canada et les États-Unis). Par exemple, Hydro-Québec a une grande marge de manoeuvre pour gérer les effets du changement climatique sur les ressources en eau au Québec, mais son champ d’action est limité pour les plans d’eau qui sont partagés avec une autre province ou les États-Unis (comme c’est le cas pour le Saint-Laurent et la rivière Richelieu qui sont partagés avec les États-Unis). La création de commissions de gestion des eaux transfrontalières qui discuteraient des effets du changement climatique et des mesures d’adaptation pourrait faciliter à l’avenir l’adaptation des services publics.


[c] Par exemple, les effets du changement climatique ont été soulevés lors de l’audience publique d’Hydro-Québec à la Commission permanente de l’économie et du travail sur le Plan stratégique 2006-2010 d’Hydro-Québec (Assemblée nationale 2006).
[d] La demande accrue pour la climatisation l’été ne devrait pas compenser la réduction de la demande pour le chauffage.
[e] Consulter l’évaluation des impacts environnementaux pour le complexe hydroélectrique La Romaine (Hydro-Québec 2008).
[f] Pour des exemples, consulter Minville et al. 2009.
[12] Silver et Roy, 2010
[13] Gagnon, Locat et Pelletier, 1998
[14] Gouvernement du Québec, 2000
[15] Lecomte, Pang et Russell, 1998
[16] Lecomte, Pang et Russell, 1998
[17] Hydro Québec, 1998
[18] Lasserre et Descroix, 2005
[19] Comité provincial d’examen (COMEX), 2006
[20] Division de la protection de l’environnement, Environnement Canada, 2008
[21] Silver et Roy, 2010