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Courant de changement – Chapitre 4.5 : Secteur forestier

Chapitre quatre

Secteur forestier

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Dans son examen de l’utilisation de l’eau par le secteur forestier, la TRNEE met l’accent à la fois sur les activités de gestion forestière, telles que l’exploitation et la plantation d’arbres, et sur les industries de la fabrication de produits forestiers. Le secteur manufacturier comprend essentiellement la fabrication des pâtes et papiers, y compris les usines de pâtes et papiers, le bois d’oeuvre de résineux et les autres produits du bois. L’utilisation d’eau pour la production de bois d’ingénierie, de sciages de résineux et de panneaux de construction est habituellement extrêmement faible (correspondant à environ 1 % de l’utilisation d’eau de l’industrie des pâtes et papiers[104]) et devrait rester faible dans l’avenir. Il n’est donc pas question de ce sous-secteur dans le présent rapport.

La gestion forestière et les activités de fabrication ont des incidences sur les ressources en eau, bien que fort différentes les unes des autres. La gestion durable des forêts exerce une influence déterminante sur l’hydrologie et la qualité de l’eau des bassins versants. L’utilisation de l’eau est à peu près la même dans l’industrie de la fabrication de pâtes et papiers que dans le secteur minier en ce que le taux d’utilisation brute y est élevé et le taux d’utilisation non rationnelle, faible. Le secteur ne voit pas l’utilisation de l’eau comme une grande priorité puisqu’il renvoie dans les eaux de surface la majeure partie de l’eau qu’il prélève[105]. La plupart des établissements se soucient moins de la disponibilité de l’eau puisqu’ils sont pour la plupart situés sur de grand cours d’eau dans des régions sans pénuries d’eau à l’heure actuelle. Toutefois, les établissements industriels qui sont en bordure de plus petits cours d’eau ou de cours d’eau dont le débit varie au gré des saisons sont très soucieux d’économiser l’eau. La gestion de l’eau, sur les plans de la conservation comme du traitement des eaux usées, leur est importante.

Importance économique du secteur forestier pour le Canada

En 2008, l’apport total du secteur au PIB national a été de près de 2 %. L’industrie de la transformation du bois et de la fabrication du papier a, pour sa part, contribué pour 11 % du PIB manufacturier[106]. L’industrie des produits forestiers est active dans 12 des 13 provinces et territoires du Canada. Toutefois, la majorité des collectivités vivant de la forêt se trouve en Colombie-Britannique, en Ontario, au Québec et en Nouveau-Brunswick (figure 16 et 17).

Le Canada est le plus grand exportateur mondial de produits forestiers, en ayant exporté pour 30,2 milliards de dollars au total en 2008. Il s’agit du plus grand exportateur et du deuxième producteur de sciages de résineux et de pâte de bois et du plus grand producteur et exportateur de papier journal au monde. Les États-Unis sont le plus grand importateur de produits forestiers canadiens; les pays d’Asie en sont aussi d’importants importateurs.

La croissance économique de l’industrie ralentit depuis quelque temps. L’industrie des pâtes et papiers, en particulier, fait face à d’énormes défis structurels à long terme depuis le milieu des années 1990. Selon Ressources naturelles Canada, plus de 300 usines (usines de pâte, usines de papier, scieries, etc.) ont fermé leurs portes et quelque 33 000 emplois ont disparu des usines depuis 2003. Les pertes d’emplois se sont accélérées en 2006 et en 2007[107]. L’industrie devrait continuer de connaître une faible croissance compte tenu des difficultés économiques des derniers temps, en l’occurrence : un marché immobilier qui demeure déprimé aux États-Unis; le déclin continu de la demande de papier journal sous l’effet de la concurrence des médias en ligne; les prix élevés de l’énergie; la montée du prix de la fibre occasionnée par la fermeture d’usines; et l’inconvénient pour les exportateurs de la vigueur soutenue de la devise canadienne.

On prévoit que d’importantes contraintes seront imposées à l’offre et à la demande pour restreindre la croissance à moyen et à long terme de l’industrie. Le secteur des produits forestiers ne prévoit pas connaître de croissance à court terme, compte tenu de la récession économique mondiale des derniers temps, mais s’attend plutôt à une reprise à moyen et à long terme.

Principales utilisations de l’eau

Le présent survol s’intéresse aux grandes utilisations de l’eau dans le domaine de la gestion forestière et de la fabrication des pâtes et papiers.

FIGURE 16

Figure 16 : Usines de produits forestiers au Canada

Gestion forestière

La gestion forestière joue un rôle important en régulant la quantité d’eau et a un impact décisif sur la distribution des ruissellements, la qualité de l’eau, l’alimentation des nappes souterraines et la gestion des plaines inondables. À la base, les forêts agissent sur les ressources en eau en interceptant les précipitations et en captant l’humidité du sol. On estime que les forêts canadiennes interceptent la moitié des précipitations qui s’abattent sur elles, le reste allant alimenter les eaux de surface et souterraines[109]. Les forêts améliorent l’infiltration de l’eau dans le sol et préviennent l’érosion, fournissant par conséquent des services écologiques de gestion des eaux.

Toutes les terres forestières procurent de tels services écosystémiques, mais la forêt boréale du Canada en est un exemple remarquable. En effet, elle renferme la plus grande zone de tourbières au monde; celles-ci jouent un rôle fondamental de protection contre les crues et de filtration de l’eau. De récentes études démontrent que la forêt boréale du Canada renferme, à quelque 200 milliards de tonnes, plus de carbone que tout autre écosystème terrestre de la planète[110]. Les décisions de gestion des terres touchant la forêt boréale sont donc d’importance nationale et mondiale.

Les principales activités de gestion forestière susceptibles de nuire aux ressources en eau sont la construction de chemins d’accès, la récolte des arbres, le reboisement et l’application de pesticides. Bien qu’elles n’utilisent que de faibles quantités d’eau, les activités de gestion forestière peuvent avoir et ont un effet important sur la qualité de l’eau dans les bassins versants. Les bassins hydrographiques du Canada ont fait l’objet d’une exploitation forestière intensive (figure 17). Ces activités sont toutefois assujetties à des règles et directives de façon à nuire le moins possible moyennant une gestion responsable. Comme la structure de la forêt, y compris son reboisement, a beaucoup d’influence sur les bassins versants, cela demeure un facteur important de développement durable des forêts et des écosystèmes.

Fabrication des pâtes et papiers

L’industrie de la fabrication des pâtes et papiers utilise de grands volumes d’eau puisque 5 % de l’utilisation brute de l’eau au Canada s’y réalise. Mais il s’agit pour l’essentiel d’une utilisation rationnelle et près de 90 % de l’eau est rendue à des étendues d’eaux de surface après traitement. De plus, les taux de recyclage de l’eau sont élevés dans les usines. Dans l’ensemble, l’utilisation brute de l’eau, l’intensité de l’utilisation de l’eau (par unité de production) et les prélèvements d’eau par les fabricants de produits forestiers ont diminué substantiellement depuis les années 1980[111].

FIGURE 17

Figure 17 : État du développement dans les bassins versants forestiers

Simplement dit, la fabrication des pâtes se fait par des procédés chimiques ou mécaniques afin de récupérer la cellulose en la séparant de la lignine et d’autres substances ligneuses. Ceci dit, les deux types de procédés requièrent l’emploi d’importants volumes d’eau. L’eau sert à quatre grandes fonctions dans les usines de pâtes et papiers : la composition des produits chimiques, l’acheminement des matières tout au long du processus de production, la séparation des matières et le refroidissement[113]. C’est pour les procédés et le refroidissement qu’il s’utilise le plus d’eau. L’eau qui est ajoutée par l’utilisation de produits chimiques à teneur en eau compense la petite quantité d’eau susceptible d’être consommée durant la production*. Il est impératif de conserver l’eau dans les usines, les eaux de procédé et de refroidissement y étant ségréguées le plus possible. Les deux efforts, en sus du recyclage, réduisent la quantité d’eau à traiter et les besoins subséquents en énergie. Les eaux usées d’une usine sont un volet crucial de la gestion que celleci fait de ses eaux. Celles-ci sont traitées avant d’être rejetées afin de respecter le Règlement sur les effluents des fabriques de pâtes et papiers.

Principaux enjeux liés à l’eau

Effets des usines de pâtes et papiers sur la qualité de l’eau et les écosystèmes aquatiques

Les principales préoccupations environnementales gravitent autour des effluents des usines de pâtes et papiers et de la nécessité d’en atténuer la nuisance potentielle pour les organismes aquatiques et de réduire au minimum l’enrichissement en matières nutritives. Les effluents qui entrent dans un plan d’eau peuvent y augmenter la demande biologique en oxygène (DBO), le total des solides en suspension (TSS) et la quantité de substances organiques chlorées en plus d’avoir des effets sur le poisson et le benthos. Sans oublier qu’il peut s’agir d’effets nocifs si les quantités dépassent la capacité d’assimilation de l’environnement aquatique. Les effluents des usines de pâtes et papiers ont grandement diminué au cours des 15 dernières années† par suite de la combinaison de règles strictes, de règlements rigoureux de surveillance‡ et de la réponse de l’industrie, qui a réduit ces rejets.

La connaissance limitée des interactions entre les ressources hydriques et forestières

Il est généralement reconnu qu’on en sait trop peu sur les interactions entres les ressources hydriques et forestières et que la plupart des décisions de gestion des forêts se fondent sur des recherches périmées. Il s’est fait beaucoup de recherches canadiennes sur l’hydrologie forestière durant les années 1960 et 1970, mais il s’en fait beaucoup moins depuis. Le potentiel d’impact du changement climatique souligne la nécessité de reprendre ces travaux au Canada. Le nombre croissant de feux de forêt, les perturbations attribuables aux insectes et l’évolution des essences forestières auront des effets spectaculaires sur les ressources en eau douce. Il y a deux défis à surmonter :

  • La gestion forestière est généralement orchestrée en fonction du peuplement plutôt que du bassin hydrologique, et cela doit changer.
  • La recherche dans ce domaine au Canada est sous-financée et il y a un déficit d’expertise.

Le National Council for Air and Stream Improvement a récemment évalué les effets de la gestion forestière sur l’hydrologie et la qualité de l’eau au Canada et aux États-Unis. Il en a conclu que l’ampleur et la durée des effets de la gestion forestière sur l’hydrologie et la qualité de l’eau varient beaucoup au Canada. Le rapport recommande, au vu de cette variabilité, que des études des bassins versants soient faites dans les écozones au sein desquelles les résultats seraient appliqués à la gestion forestière[114]. Il nous faut continuer à recueillir des données pour mieux comprendre les effets de l’exploitation forestière sur les ressources en eau. Ces efforts soutenus de recherche permettront du coup de mieux gérer les forêts.

Permission publique d’exploiter

Soucieux de l’intérêt public, le secteur forestier apporte depuis longtemps d’importantes améliorations à sa feuille de route écologique. Le plus souvent, le public se préoccupe davantage de la qualité de l’eau et des problèmes de santé que du prélèvement et de la quantité d’eau. Tout récemment, le secteur s’est vu confier la mission de voir aux enjeux liés à la qualité de l’eau et à la perturbation endocrinienne. Là où les collectivités locales ont manifesté des inquiétudes quant au volume d’utilisation de l’eau, les acteurs de ce secteur se sont efforcés de partager l’information existante ainsi que les résultats des études de suivi des effets de cette utilisation sur l’environnement. Les améliorations et les progrès du secteur ont été intégrés dans la délivrance des attestations par de tierces parties, l’établissement des rapports sur le développement durable et les programmes d’écoétiquetage. En outre, certaines usines s’efforcent maintenant de participer de plein gré à l’Alliance pour la gestion de l’eau et d’intégrer le Global Water Tool du World Business Council for Sustainable Development à leurs activités pour la communication de renseignements sur leur utilisation de l’eau. Pour demeurer concurrentiel, le secteur forestier canadien examine de près son « empreinte » hydrique et ses besoins d’eau potentiels dans le but d’améliorer son utilisation de la ressource, et ce, à la demande expresse de clients.

Leviers, défis et possibilités

Les améliorations économiques et environnementales sont les facteurs qui incitent le plus les usines de pâtes et papiers à utiliser moins d’eau. La réduction des besoins en eau entraîne une baisse des coûts du traitement de l’eau et de l’utilisation d’énergie. Des règles et des normes environnementales rigoureuses peuvent aussi pousser à mieux économiser l’eau.

Pour l’instant, le défi principal du secteur est d’ordre économique, puisque la conjoncture limite les dépenses d’investissement dans les nouvelles technologies et l’innovation. Malgré cela, il y a de multiples possibilités de recherche et développement de technologies innovatrices d’utilisation de l’eau[115] pour les usines de pâtes et papiers. Il s’agit surtout de trouver des méthodes de recyclage et de réutilisation des eaux de procédé ou des procédés innovants de traitement des effluents tels que des usines à faible émission d’effluents. Mais le secteur soutient que le gouvernement doit l’aider à profiter de ces occasions en lui offrant des incitatifs et de l’aide.

L’industrie estime qu’il est un aspect particulier des exigences de qualité des effluents de la Loi sur les pêches fédérale qui l’empêche d’utiliser l’eau plus efficacement. C’est qu’en vertu du règlement actuel, les effluents d’une usine doivent faire l’objet d’analyses, notamment d’essais de toxicité aiguë. Afin de satisfaire aux exigences, les usines doivent s’assurer que leurs effluents respectent les niveaux réglementés avant de les évacuer dans les eaux de surface. L’industrie croit que la nature des exigences réglementaires en matière de toxicité l’empêche d’utiliser encore moins d’eau et préconise l’adoption d’une approche différente pour déterminer la concentration des effluents en produits toxiques.

En résumé

Compte tenu du ralentissement récent de la croissance dans le secteur et de la faiblesse de celle qu’on lui prévoit au cours des prochaines années, surtout pour les usines et de pâtes et papiers, on ne s’attend pas à ce que l’utilisation de l’eau s’y accroisse. Mais à la longue, le secteur rebondira très probablement et dit craindre ce que l’avenir lui réserve au chapitre de la disponibilité en eau. Les usines qui existent ou qui ont récemment fermé leurs portes ont des allocations d’eau. Force est de se demander si elles conserveront le droit de les utiliser dans l’avenir. Les populations locales et les clients de l’étranger maintiendront la pression sur le secteur pour que celui-ci continue à s’acquitter de ses responsabilités de gestion des eaux, y compris d’utilisation de celles-ci.

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* Pour une pleine description de l’utilisation de l’eau dans les usines de pâtes et papiers, consulter Rendement de la consommation d’eau et pratiques dans les fabriques ayant une faible consommation d’eau. Bulletin technique no 968. National Council for Air and Stream Improvement (NCASI). Novembre 2009. † Prenant acte de ces améliorations, le gouvernement fédéral a récemment réduit les exigences générales de ses programmes d’ESEE, mettant sur pied des programmes de suivi plus locaux pour s’attaquer à des problématiques particulières. ‡ Cet aspect du secteur est assujetti au Règlement sur les effluents des fabriques de pâtes et papiers de la Loi sur les pêches du gouvernement fédéral et à divers autres règlements provinciaux. De plus, les usines doivent participer à un programme fédéral d’études de suivi des effets sur l’environnement (ESEE).