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Chapitre 5 : Efficience des politiques climatiques

État de la situation : la lutte contre le changement climatique au Canada

 

 

En matière de politique climatique, tous les pays ont le même objectif : réduire le plus possible les émissions de GES au moindre coût économique. Comment le Canada s’en sort il à cet égard? Le présent chapitre examine l’efficience actuelle des politiques climatiques du Canada, ainsi que les coûts des politiques supplémentaires qu’il faudrait mettre en place pour éliminer l’écart des émissions. On estime d’abord les coûts des réductions des émissions prévues dans le cadre des mesures existantes et proposées des gouvernements, puis on évalue les coûts des mesures supplémentaires nécessaires pour éliminer l’écart par rapport à la cible fixée pour 2020. Dans quelle mesure la combinaison actuelle des politiques fédérales, provinciales et territoriales permet elle des réductions des émissions à faible coût? Surtout, comment le Canada peut il diminuer suffisamment ses émissions de façon efficiente pour atteindre la cible de 2020? En tentant de répondre à ces questions, l’analyse présentée ci dessous jette des bases pour la formulation de recommandations à propos des futures politiques climatiques et éclaire la stratégie du gouvernement en matière de réglementation sectorielle.

5.1 Approche de l’analyse économique

L’analyse économique présentée ci dessous est fondée sur le chapitre précédent, où sont présentées les réductions des émissions prévues en 2020 au titre des politiques et programmes fédéraux, provinciaux et territoriaux existants et proposés. La Figure 17 présente une vue simplifiée des prévisions des émissions globales, divisées en deux catégories : les réductions des émissions prévues découlant des politiques fédérales, provinciales et territoriales existantes et proposées (environ 104 Mt éq-CO2 en 2020) et les réductions des émissions supplémentaires nécessaires pour atteindre la cible du Canada pour 2020 (117 Mt éq-CO2 de plus en 2020).

FIGURE 17: RÉDUCTIONS DES ÉMISSIONS NATIONALES EN VERTU DES POLITIQUES FÉDÉRALES, PROVINCIALES ET TERRITORIALES EXISTANTES ET PROPOSÉES ET ÉCART À LA CIBLE DE 2020

Ces deux catégories de réductions des émissions en 2020 – les 104 Mt éq-CO2 pour lesquelles le Canada prend ou entend prendre des mesures et les 117 autres Mt éq-CO2 nécessaires pour atteindre la cible de 2020 – encadrent l’analyse économique présentée ici. On explore d’abord les coûts des réductions des émissions prévues découlant des politiques existantes et proposées (c’est à dire la mesure dans laquelle le Canada est sur la bonne voie pour atteindre son objectif de réduction des émissions de 104 Mt éq-CO2 en 2020 à moindre coût), puis on évalue les éventuelles politiques supplémentaires qui permettraient d’atteindre de la façon la plus efficiente possible une réduction supplémentaire des émissions de 117 Mt éq-CO2.

L’analyse présentée pousse l’évaluation au delà de l’efficacité environnementale des politiques existantes et proposées – c’est à dire de l’importance des réductions qu’elles permettent d’atteindre – et tient compte de leur efficience – c’est à dire des coûts associés aux réductions. Pour ce faire, on catégorise les réductions des émissions prévues en fonction de leur coût de réduction marginal, soit le coût additionnel associé à ces réductions supplémentaires en vertu de la politique, en dollars la tonne. L’annexe 7.2 présente une courte description de la méthodologie de modélisation technique utilisée pour catégoriser les réductions des émissions en fonction de leur coût.

Cette analyse peut être utile aux décideurs, mais il convient d’appliquer les constatations en reconnaissant explicitement leurs limites :

  • L’efficience n’est pas le seul facteur important de l’élaboration de politiques. D’autres éléments clés doivent être pris en considération, par exemple les avantages secondaires comme la réduction de la pollution de l’atmosphère, la santé, l’équité entre régions ou entre ménages ayant des niveaux de revenu différents et d’autres enjeux transitoires à plus long terme (par exemple, la cible de réduction des émissions de 2050). Ces autres éléments ne s’inscrivent pas dans la portée de l’analyse exposée ici.
  • Il importe également de souligner que la modélisation ne représente pas parfaitement le contexte économique. Même si les modèles peuvent être utiles pour recenser les sources possibles de réduction efficiente des émissions, les constatations présentées ne constituent pas des certitudes. Elles visent à éclairer l’élaboration des politiques, mais ne doivent pas être interprétées comme étant une feuille de route finale ou prescriptive.
L’analyse présentée pousse l’évaluation au-delà de l’efficacité environnementale des politiques existantes et proposées – c’est-à-dire de l’importance des réductions qu’elles permettent d’atteindre – et tient compte de leur efficience – c’est-à-dire des coûts associés aux réductions.

5.2 Coût des réductions des émissions découlant des politiques en vigueur et des projets de politiques

Grâce aux politiques fédérales, provinciales et territoriales existantes et proposées, le Canada est en voie de réduire considérablement ses émissions d’environ 104 Mt éq-CO2 d’ici 2020. Mais quels sont les coûts de ces réductions des émissions prévues? La Figure 18 présente les résultats d’une évaluation économique portant notamment sur les réductions des émissions prévues en 2020, catégorisées en fonction des coûts qui y sont associés. Chaque Mt éq-CO2 de réduction des émissions de GES en 2020 découlant des politiques mises en place est catégorisée comme étant à coût faible (moins de 50 $ la tonne), moyen (entre 50 $ et 100 $ la tonne) ou élevé (plus de 100 $ la tonne)p. La longueur de chacune des barres indique l’ampleur des réductions des émissions susceptibles d’être atteintes en 2020 dans chaque fourchette de coûts. La somme de toutes les réductions des émissions illustrées à la Figure 18 correspond aux 104 Mt éq-CO2 des réductions découlant des politiques existantes et proposées de l’analyse initiale; ces 104 Mt éq-CO2 ont simplement été divisées en fonction de leur coût.

FIGURE 18: CATÉGORISATION DES RÉDUCTIONS DES ÉMISSIONS NATIONALES PRÉVUES DÉCOULANT DES POLITIQUES CLIMATIQUES FPT EXISTANTES ET PROPOSÉES PAR COÛT EN 2020

Caractéristique 5 : Efficience

Comme il en est question au chapitre 3, l’efficience constitue le dernier élément de l’évaluation des plans provinciaux. Une mesure est jugée efficiente si elle coûte moins cher que les autres options de réduction des émissions. L’insistance sur les possibilités de réduction des émissions à faible coût permet de mettre en œuvre le plus grand nombre de réductions au moindre coût.

Tout d’abord, comme l’indique la Figure 18, près de la moitié des réductions des émissions prévues découlant des politiques existantes et proposées en 2020 – soit environ 51 Mt éq-CO2 — sont à faible coût. Les politiques axées sur le marché, comme la taxe sur le carbone instaurée en Colombie Britannique, le programme de l’Alberta visant les émetteurs de GES désignés et la Western Climate Initiative produisent toutes des réductions à faible coût. Les politiques axées sur des mesures incitatives commerciales sont conçues pour stimuler les réductions des émissions à faible coût. Dans le même ordre d’idées, les politiques touchant le secteur de l’électricité axées sur la rotation normale des capitaux propres – comme les normes de rendement du gouvernement fédéral en matière d’électricité et une partie de l’élimination progressive des centrales au charbon en Ontario – ont aussi tendance à produire des réductions à faible coût parce qu’elles n’exigent pas la mise hors service des immobilisations avant la fin de leur vie utile. Les politiques visant le secteur de la gestion des déchets (principalement la réglementation provinciale des gaz d’enfouissement) et le secteur de l’agriculture (considéré comme un secteur compensatoire au titre de la politique de l’Alberta visant les émetteurs de GES désignés) ont aussi tendance à produire des réductions à faible coût.

Ensuite, les résultats de l’analyse montrent que les coûts d’environ 15 Mt éq-CO2 des réductions de 2020 sont évalués entre 50 $ et 100 $ la tonne éq-CO2. La majorité des réductions des émissions à coût moyen proviennent du secteur de l’électricité, surtout de l’Ontario. Le démantèlement progressif des centrales au charbon en Ontario constitue donc probablement un moteur important de ces réductions, puisque certaines centrales sont fermées avant la fin de leur durée de vie normale.

Enfin, les résultats de l’analyse indiquent qu’environ 38 Mt éq-CO2 – soit un peu plus du tiers – des réductions des émissions de 2020 découlant des politiques existantes et proposées auront un coût élevé (plus de 100 $ la tonne). Ces réductions des émissions à coût élevé proviennent de divers secteurs de toutes les provinces et territoires, mais sont surtout attribuables aux secteurs du transport, du bâtiment, de l’électricité et du pétrole et du gaz. Les réductions des émissions des véhicules – notamment celles qui seront réalisées au titre des normes fédérales visant les véhicules – sont généralement associées à des coûts de réduction marginaux globalement élevés, parce qu’il faut offrir aux particuliers des avantages très intéressants pour les inciter à choisir des véhicules plus petits et consommant moins d’essence ou encore des véhicules faisant appel à de nouvelles technologies, par exemple des moteurs hybrides ou électriques. Les réductions des émissions dans le secteur du bâtiment commercial et résidentiel ont aussi tendance à coûter cher la tonne, en partie parce que les bâtiments et les appareils électriques deviennent généralement plus efficients au fil du temps même sans mesures d’incitation, ce qui réduit l’effet additionnel des politiques mises en œuvre dans toutes les provinces afin d’accroître l’efficience. Le remplacement des sources de production d’électricité à fortes émissions de carbone par des sources à faibles émissions est également associé à des coûts élevés, bien que comme il en est question plus loin, les réductions des émissions provenant du secteur de la production d’électricité sont réparties dans les trois fourchettes de coûts. Enfin, on estime que les projets de CSC en Alberta et en Saskatchewan sont associés à des réductions à coût moyen et élevé, selon les projets.

Malgré la concentration des réductions à faible coût, le choix de certaines options de réduction des émissions à coût élevé permet de croire que les gouvernements sont parfois prêts – consciemment ou non – à mettre en place des politiques qui ne s’attaquent pas seulement aux solutions les plus faciles.

5.3 Coût des réductions pour atteindre la cible de 2020

Comme il en est question au chapitre précédent, les politiques existantes et proposées permettront probablement de réduire de façon notable les émissions, mais ces réductions ne correspondent qu’à environ la moitié de celles qui sont nécessaires pour atteindre la cible du Canada pour 2020. Les gouvernements devront mettre en place d’autres politiques pour stimuler les réductions supplémentaires des émissions de 117 Mt éq-CO2. La présente analyse examine les répercussions sur les coûts de l’élimination de cet écart. La Figure 19 illustre les coûts des réductions supplémentaires des émissions de 117 Mt éq-CO2 nécessaires pour atteindre la cible de 2020. Comme dans la dernière figure, les réductions supplémentaires des émissions sont catégorisées en fonction de leur coût économique. Les résultats de l’analyse indiquent que toutes les réductions des émissions possibles au Canada, à concurrence de 150 $ la tonne, doivent être réalisées pour atteindre la cible de 2020.

FIGURE 19: RÉDUCTIONS SUPPLÉMENTAIRES DES ÉMISSIONS NÉCESSAIRES POUR ATTEINDRE LA CIBLE DU CANADA POUR 2020 (L’« ÉCART DES ÉMISSIONS »)

La Figure 19 montre qu’environ 75 % de l’écart entre les émissions prévues en 2020 et la cible fédérale pour les réductions des émissions ne peut être comblé que par des mesures de réduction des émissions à coût moyen ou élevé. Ces mesures sont toutes considérées comme efficientes puisque ce sont celles qui coûtent le moins cher pour atteindre la cible de 2020. Près de 48 Mt éq-CO2 des réductions entrent dans la catégorie des mesures « à coût élevé » (qui ne dépassent pas 150 $ la tonne dans ce cas), alors qu’environ 41 Mt éq-CO2 correspondent à des mesures à coût moyen et 28 Mt éq-CO2, à des mesures à faible coût. Les données de la figure indiquent que les possibilités de réductions à faible coût sont de plus en plus limitées dans le contexte de la cible fédérale pour 2020. En gros, comme il ne reste que huit ans d’ici 2020, les possibilités de mettre en place des mesures à faible coût dans le secteur de l’approvisionnement en énergie et dans les secteurs industriels sont moindres, les entreprises et les ménages ayant déjà pris des décisions d’investissement les engageant à atteindre un certain niveau d’émissions en 2020.

La Figure 20 illustre le profil des coûts des politiques canadiennes nécessaires pour atteinte la cible de 2020. Elle combine les données de la Figure 18 et celles de la Figure 19, et présente côte à côte les réductions supplémentaires des émissions nécessaires pour atteindre la cible de 2020 de la Figure 19 et les réductions des émissions prévues découlant des politiques gouvernementales existantes et proposées présentées dans la Figure 18; les réductions sont encore une fois catégorisées comme étant à coût faible, moyen ou élevé.

FIGURE 20: Réductions des émissions en 2020 découlant des politiques fédérales, provinciales et territoriales existantes et proposées et écart à la cible du Canada pour 2020

Outre les réductions prévues découlant des politiques existantes et proposées, des mesures supplémentaires devront être prises pour stimuler les réductions des émissions afin de combler l’écart des émissions. Pour atteindre la cible du Canada pour 2020, toutes les réductions des émissions présentées dans la figure doivent être réalisées. La présente analyse montre qu’il existe des possibilités de réduction supplémentaire des émissions dans toutes les fourchettes de coûts. Même si les politiques existantes et proposées ciblent des réductions dans toutes les catégories de coûts, certaines réductions à coût faible ou moyen ne sont comprises dans aucune politique. Le Canada devra de plus en plus axer sa politique climatique sur les mesures de réduction des émissions à coût moyen ou élevé s’il veut atteindre sa cible pour 2020.

5.4 Réduction efficiente des émissions

Comment devrait on orienter les politiques pour réaliser avec efficience les réductions supplémentaires des émissions nécessaires pour atteindre la cible de 2020? On peut ventiler les mesures de réduction des émissions à coût élevé, moyen et faible en fonction de leur type par secteur d’activité et par région afin d’éclairer l’élaboration des politiques additionnelles que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux pourraient mettre en œuvre pour stimuler ces réductions supplémentaires des émissions. Soulignons que la présente analyse de modélisation ne formule aucune hypothèse à propos de politiques spécifiques comme outil de stimulation des mesures de réduction des émissions décrites. Les politiques que les gouvernements pourraient adopter pour stimuler les réductions efficientes des émissions décrites sont nombreuses. Le principal intérêt de l’analyse réside dans la façon dont elle peut aider le gouvernement fédéral à mettre en place une réglementation sectorielle.

Écart des émissions à combler, par mesure

Les mesures s’entendent des décisions que les entreprises et les ménages prennent afin de réduire leurs émissions en réponse aux politiques des gouvernements, par exemple utiliser l’énergie de manière plus efficiente, recourir à des carburants de remplacement produisant moins d’émissions (stratégie de « remplacement des combustibles »), réduire la production afin de générer moins d’émissions (mais aussi moins d’extrants), ou mettre en œuvre des méthodes de captage et de stockage des émissions de CO2. Il importe de souligner que toutes les mesures de réduction des émissions décrites dans le présent document ne seront mises en œuvre qu’en réponse à des politiques. Les mesures de réduction à coût élevé ne peuvent être réalisées que par l’instauration de politiques très rigoureuses par les gouvernements. La Figure 21 illustre les composantes à coût faible, moyen et élevé de l’écart des émissions de 117 Mt éq-CO2, par mesure.

FIGURE 21: COÛTS DES RÉDUCTIONS DES ÉMISSIONS NÉCESSAIRES POUR COMBLER L’ÉCART À LA CIBLE DE 2020, PAR MESURE

L’analyse de la TRN montre que les mécanismes de CSC constituent probablement une composante clé d’une stratégie efficiente de réduction des émissions. Les résultats indiquent qu’au total, environ 62 Mt éq-CO2 seront éliminées par captage du carbone en 2020, ce qui représente plus de 50 % des réductions supplémentaires des émissions requises; même si les coûts sont répartis dans toutes les fourchettes, les réductions des émissions sont généralement possibles à un coût marginal supérieur à 100 $ la tonne éq-CO2 (bien qu’il existe certaines méthodes de CSC moins coûteuses permettant de capter un flux homogène de CO2). Le scénario fortement axé sur le CSC illustré ici est crédible si on établit des politiques suffisamment rigoureuses (par exemple, un prix du carbone maintenu entre 100 $ et 150 $ la tonne éq-CO2); les entreprises prendront alors rapidement des mesures pour mettre en place des mécanismes de CSC. Les investissements considérables nécessaires pour mettre en place les initiatives de CSC nécessaires pour atteindre les objectifs d’ici 2020 devraient s’accompagner d’un contexte d’obtention de permis et de construction facilité par le gouvernement ainsi que de signaux clairs à propos des coûts futurs des émissions de carboneq

La deuxième catégorie de mesures la plus importante est l’amélioration de l’efficacité énergétique, qui représente des réductions de 16 Mt éq-CO2 en 2020. Les améliorations de l’efficacité énergétique permettant d’atteindre de telles réductions sont concentrées dans les secteurs du transport et du bâtiment. Toutefois, les gains d’efficience réalisés sont partiellement annulés par l’augmentation de la demande en énergie attribuable au déploiement accru de mécanismes de CSC.

Le remplacement de combustibles par l’électricité représente des réductions possibles d’environ 13 Mt éq-CO2 en 2020. Les mesures d’électrification dans les secteurs du bâtiment et de l’industrie légère sont réalisables à un coût relativement faible. Il est aussi possible d’accroître l’électrification dans le secteur du transport, bien que le potentiel de cette avenue soit restreint à cause de l’échéance rapprochée de 2020. À long terme, il est probable que l’électrification jouera un rôle beaucoup plus important dans la réduction efficiente des émissions dans tous les secteurs économiques, puisque l’équipement peut être converti à l’électricité à la fin de son cycle de vie normal, les technologies électriques comme les thermopompes et les batteries peuvent être améliorées et le secteur de la production d’électricité peut se décarboniser entièrement.

Les autres mesures qui permettraient de combler l’écart comprennent la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le remplacement des combustibles par des carburants renouvelables et la réduction de la production. Ensemble, ces mesures représentent des réductions supplémentaires de 21 Mt éq-CO2 en 2020. Parmi les autres mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre, citons la modification des procédés industriels et la réduction de la ventilation et du brûlage des émissions du secteur pétrolier et gazier. Ces mesures sont généralement réalisables à des coûts faibles ou moyens.

Enfin, on constate que certaines réductions sont attribuables à la baisse de la production industrielle d’importants produits à forte consommation d’énergie. Soulignons que l’on présume que la production de pétrole brut ne fluctue pas en fonction des politiques climatiques. Bien que beaucoup d’installations pourraient mettre en place des mécanismes de CSC et maintenir leur production, cette hypothèse fait en sorte que l’analyse sous estime probablement l’incidence d’une production réduite sur les résultats d’une approche efficiente pour l’atteinte de la cible de 2020.

Écart des émissions à combler, par secteur d’activité

L’examen des réductions possibles des émissions par secteur est également révélateur, compte tenu notamment des intentions déclarées du gouvernement fédéral de mettre en place une réglementation sectorielle des émissions de GES. La Figure 22 présente une ventilation des réductions des émissions requises illustrées à la Figure 19 par secteur d’activitér. Encore une fois, les réductions des émissions totales représentent les 117 Mt éq-CO2 supplémentaires nécessaires pour combler l’écart. Les réductions des émissions à coût faible, moyen et élevé nécessaires pour permettre au Canada d’atteindre sa cible de 2020 sont présentées séparément pour chaque secteur d’activité.

FIGURE 22: COÛTS DES RÉDUCTIONS DES ÉMISSIONS NÉCESSAIRES POUR COMBLER L’ÉCART À LA CIBLE DE 2020, PAR SECTEUR D’ACTIVITÉ

La priorité devrait être accordée aux secteurs où les réductions les plus importantes peuvent être réalisées au moindre coût, bien que pour atteindre la cible de 2020, toutes les réductions supplémentaires des émissions indiquées à la Figure 22 doivent être encouragées par des politiques adéquates. Quelques constatations intéressantes ressortent de l’analyse.

Cette constatation appuie le plan d’Environnement Canada, qui propose de s’attaquer à la réglementation des émissions du secteur pétrolier et gazier dans le cadre de sa stratégie sectorielle de réduction des émissions.

Tout d’abord, la Figure 22 indique que près de la moitié des réductions nécessaires pour combler l’écart pourraient provenir du secteur pétrolier et gazier, et que la majorité des mesures de réduction de ce secteur pourraient être mises en œuvre à un coût relativement faible ou moyen. Cette constatation appuie le plan d’Environnement Canada, qui propose de s’attaquer à la réglementation des émissions du secteur pétrolier et gazier dans le cadre de sa stratégie sectorielle de réduction des émissions. En outre, il n’est pas étonnant qu’il existe des possibilités de réductions efficientes dans ce secteur; comme il est appelé à croître considérablement, il est possible de mettre en place une nouvelle capacité de production faisant appel à de l’équipement à faibles émissions si les politiques appropriées sont instaurées. Les mesures de réduction à faible coût touchant le secteur pétrolier et gazier comprennent les améliorations de l’efficacité énergétique, le remplacement des combustibles par l’électricité et dans une certaine mesure, la mise en place de mécanismes de CSC.

Par ailleurs, il est probablement possible de réaliser certaines réductions importantes dans le secteur de la fabrication à un coût faible ou moyen. L’existence de ces possibilités de réductions à faible coût est probablement attribuable au fait que les politiques fédérales, provinciales et territoriales existantes et proposées ne portent pas une attention particulière à ce secteur.

Enfin, il existe d’autres possibilités de réduction des émissions issues de la production d’électricité en 2020, mais elles sont principalement associées à des coûts élevés, en partie à cause des solides progrès réalisés à ce jour dans la réduction des émissions de ce secteur grâce à des mesures à coût faible ou moyen, ce qui ne laisse que les mesures à coût élevé à mettre en œuvre. D’autres réductions des émissions du secteur de l’électricité peuvent être réalisées grâce à la modernisation des centrales thermiques au charbon (des mécanismes de CSC étant mis en œuvre principalement en Alberta et en Saskatchewan) ou à leur remplacement par des sources à plus faibles émissions, notamment par des sources d’énergie renouvelables. L’atteinte de la cible s’accompagnera probablement d’un hausse accrue de la demande en électricité en raison d’autres politiques qui stimulent le remplacement du pétrole et du gaz par l’électricité, ce qui fera en sorte qu’il sera plus difficile pour le secteur de l’électricité de réduire ses émissions durant cette période.

Écart des émissions à combler, par région

La Figure 23 illustre les réductions des émissions requises dans l’ensemble des régions dans différentes fourchettes de coût afin d’atteindre avec efficience la cible du Canada pour 2020.

FIGURE 23: COÛTS DES RÉDUCTIONS DES ÉMISSIONS NÉCESSAIRES POUR COMBLER L’ÉCART À LA CIBLE DE 2020, PAR PROVINCE

Certains résultats particuliers ressortent. Les possibilités de réduction efficiente des émissions sont plus nombreuses en Alberta que dans n’importe quelle autre région, et comprennent environ 22 Mt éq-CO2 en mesures à coût élevé, 24 Mt éq-CO2 en mesures à coût moyen et 15 Mt éq-CO2 en mesures à faible coût. Ces constatations correspondent aux résultats par secteur d’activité présentés plus haut, puisque beaucoup des possibilités de réduction des émissions en Alberta sont liées au secteur pétrolier et gazier. L’Ontario et la Colombie Britannique devront aussi réduire considérablement leurs émissions. En Colombie Britannique, les mesures à faible coût sont principalement associées au secteur du gaz naturel. L’Ontario pourrait réaliser des réductions à faible coût d’environ 6 Mt éq-CO2 – dont la majeure partie dans le secteur de la fabrication – et d’autres réductions à coût moyen de 7 Mt éq-CO2. Presque toutes les provinces devront mettre en œuvre des mesures de réduction des émissions à coût élevé; une bonne partie de ces mesures sont liées aux secteurs du transport et du bâtiment, qui sont des secteurs importants partout au Canada. Dans l’ensemble, ces constatations traduisent bien le défi que pose la cible de 2020 : les réductions des émissions doivent provenir de plusieurs sources à l’échelle du pays, mais d’après les résultats de l’analyse, la majorité doivent être réalisées en Alberta.

Les résultats mettent en lumière les défis que pose le partage du fardeau des réductions des émissions nationales entre les provinces. La répartition des réductions des émissions possibles à l’échelle du pays illustrée ici est efficiente sur le plan économique. Comme on l’a souligné plus haut, pour atteindre la cible de 2020 avec efficience, chaque province doit mettre en œuvre toutes les mesures de réduction des émissions possibles coûtant au plus 150 $ la tonne éq-CO2. Selon cette approche, le coût marginal des réductions est effectivement réparti également à l’échelle du pays, aucune mesure de réduction des émissions ne coûtant plus de 150 $ la tonne éq-CO2, quelle que soit la province touchée. Les coûts totaux de ces réductions ne sont toutefois pas répartis également, compte tenu du fait que certaines provinces, notamment l’Ontario et surtout l’Alberta, devront assumer une plus grande part absolue de ces réductions des émissions, puisque les émissions totales et la croissance des émissions y sont plus élevées. La Figure 24 montre trois tableaux des émissions régionales. Elle indique les émissions réelles en 2005, les émissions prévues en 2020 compte tenu de toutes les politiques existantes et proposées, ainsi que les émissions prévues en 2020 si l’écart à la cible est comblé de façon efficiente.

FIGURE 24: Émissions provinciales projetées

Même si l’Alberta contribue la plus grande part des réductions des émissions dans le scénario efficient, ses émissions affichent tout de même à l’heure actuelle une croissance 1 % par rapport à celles de 2005, alors que dans toutes les autres provinces on constate une diminution allant de 17 % à 36 % par rapport à la même année de référence. Il demeure que la répartition des réductions décrite ne sert qu’à des fins d’illustration. Les résultats présentés permettent d’estimer la répartition la moins coûteuse des réductions des émissions au Canada, mais ils ne doivent pas être interprétés comme constituant une recommandation entièrement prescriptive aux fins de l’élaboration des politiques. La question du partage du fardeau est complexe et doit tenir compte d’autres facteurs en plus de l’efficience sur le plan économique, notamment des enjeux relatifs à l’équité interprovinciale. La responsabilité de la réduction des GES dans une province en particulier n’incombe pas uniquement à cette province. Le tableau dépeint permet tout de même aux décideurs de mieux comprendre la situation afin de prendre les mesures qui s’imposent pour atteindre les buts du Canada en matière de lutte contre le changement climatique. En résumé, le Canada ne peut pas atteindre sa cible sans les réductions des émissions nécessaires en Alberta, mais les interventions en Alberta à elles seules ne permettent pas au Canada d’atteindre sa cible.

En résumé, le Canada ne peut pas atteindre sa cible sans les réductions des émissions nécessaires en Alberta, mais les interventions en Alberta à elles seules ne permettent pas au Canada d’atteindre sa cible.

5.5 L’écart des émissions en 2030

Comme on l’a déjà souligné, la courte période d’ici la cible en 2020 est l’une des principales raisons pour lesquelles le Canada doit mettre en place des mesures de réduction des émissions principalement à coût élevé. Une échéance serrée signifie que les occasions de réduire les émissions au fil de la rotation normale des capitaux propres sont limitées. En pareil cas, il faut plutôt atteindre un haut niveau de réduction des émissions en modernisant ou en fermant les installations existantes ou encore en réduisant la production. Ces mesures coûtent plus cher que de remplacer l’équipement devenu désuet par des solutions dont les émissions sont inférieures. Pour souligner l’importance d’une intervention rapide et les conséquences d’un report, la Figure 25 illustre les mesures de réduction des émissions à coût faible, moyen et élevé nécessaires pour que le Canada atteigne sa cible de 2020 en retard, soit en 2030.

FIGURE 25: RÉDUCTIONS SUPPLÉMENTAIRES DES ÉMISSIONS NÉCESSAIRES POUR ATTEINDRE EN 2030 LA CIBLE DU CANADA POUR 2020

Sur une période plus longue, la nature de l’écart change considérablement. Tout d’abord, l’écart est globalement supérieur (136 Mt éq-CO2 au lieu de 117 Mt éq-CO2), puisque les émissions continuent de croître entre 2020 et 2030 malgré toutes les politiques existantes et proposées. En outre, il existe beaucoup plus de possibilités de réduction des émissions à coût faible et moyen parce que la période plus longue permet de tirer profit de la rotation normale des capitaux propres à mesure que les immobilisations à fortes émissions de carbone sont mises hors service et remplacées par d’autres immobilisations à faibles émissions.

L’analyse de la cible de 2030 a deux incidences principales sur les politiques. Elle montre notamment qu’il faut prévoir plus de temps pour synchroniser les réductions des émissions avec la rotation normale des capitaux propres et ainsi réaliser des réductions à faible coût. Un échéancier plus long permettrait de réaliser des réductions des émissions à coût moins élevé d’environ 30 Mt éq-CO2 et des réductions à faible coût d’environ 20 Mt éq-CO2 pour atteindre la cible. En revanche, il ne faut pas penser qu’un échéancier plus long constitue une panacée à la réduction des coûts. Les mesures de réduction des émissions à coût élevé et moyen demeurent nécessaires. En outre, le report de la date fixée pour l’atteinte de la cible entraîne une production supérieure d’émissions cumulatives durant la période supplémentaire. Un échéancier plus court à cause du report de la mise en œuvre des mesures stratégiques mène inévitablement à une hausse des coûts nécessaires pour « rattraper » le retard et atteindre la cible à la date prévue.

5.6 Conclusion

Ces constatations reposent sur les résultats de l’évaluation des réductions des émissions possibles présentés au chapitre 4, qui permettent de conclure que le Canada a besoin de politiques d’intervention climatique supplémentaires s’il souhaite atteindre sa cible pour 2020. Le chapitre 5 explique comment le Canada pourrait combler l’écart de la façon la plus efficiente possible. Il illustre les secteurs d’activité et les régions pour lesquels il existe probablement des possibilités de réduction des émissions à faible coût. Les principales constatations sont les suivantes :

  • L’analyse montre surtout que la cible du Canada pour 2020 constitue un objectif ambitieux qui exigera la mise en œuvre de politiques d’envergure plus rigoureuses pour stimuler des réductions des émissions dont les coûts sont de plus en plus élevés. La mise en œuvre de politiques visant à mettre progressivement en place les mesures de réduction des émissions coûtant le moins cher seulement ne permettra pas d’atteindre la cible. Les résultats de l’analyse montrent tout de même que cette cible n’est pas hors d’atteinte. Des politiques visant à stimuler des mesures de réduction dans toutes les fourchettes de coûts à concurrence de 150 $ la tonne dans toutes les régions et dans tous les principaux secteurs d’activité pourraient permettre de combler l’écart à la cible de 2020.
  • Quelques secteurs d’activité, régions et mesures clés ressortent comme des contributeurs particulièrement importants à la réduction efficiente des émissions d’ici 2020. L’analyse montre clairement que le secteur pétrolier et gazier, notamment en Alberta, a un rôle important à jouer. Cette constatation appuie l’intention d’Environnement Canada en matière de réglementation des émissions dans ce secteur. Les mécanismes de CSC joueront un rôle prépondérant dans la réduction des émissions de ce secteur.
  • Les résultats montrent aussi que l’atteinte de la cible ne dépend pas d’un secteur d’activité, d’une région ou d’une mesure en particulier. Une approche efficiente exige des réductions des émissions dans tous les secteurs et dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada. Cette constatation met en lumière un écart des politiques au Canada qui correspond à l’écart des émissions. Pour réaliser toutes les réductions des émissions à moindre coût nécessaires, le Canada doit donc soit adopter une approche stratégique nationale touchant tous les secteurs économiques, soit assurer la coordination des initiatives des différents paliers de gouvernement et des divers mécanismes stratégiques. Aucune de ces approches n’est mise en œuvre à l’heure actuelle au Canada.
  • Enfin, l’analyse fait aussi ressortir le fait que le court échéancier d’ici 2020 constitue un défi pour le Canada. Comme il ne reste que huit ans avant la date cible, bon nombre des mesures de réduction des émissions nécessaires pour atteindre l’objectif fixé sont des mesures à coût élevé. Si la date cible était fixée en 2030, un nombre beaucoup plus grand de mesures à faible coût pourraient être mises en œuvre. Cette constatation illustre bien le défi que le Canada doit relever, mais dégage aussi une leçon importante : tout délai dans la mise en œuvre d’une stratégie coordonnée des réductions réalisées dans toutes les provinces et dans tous les secteurs d’activité accroît les coûts finaux de l’atteinte des buts et des cibles climatiques du Canada.

[p] Tous les montants cités dans le présent chapitre sont en dollars canadiens de 2005.

[q] Un autre scénario dans le cadre duquel on présume qu’il ne serait pas possible de déployer à grande échelle des mécanismes de CSC d’ici 2020 a également été examiné. Si le CSC est moins important, l’écart à la cible de 2020 doit être comblé par des mesures de réduction à coût beaucoup plus élevé, notamment par des améliorations de l’efficacité énergétique et par la réduction de la production. Pour atteindre la cible de 2020, des mesures de réduction coûtant jusqu’à 300 $ la tonne doivent être explorées. Le scénario de base décrit ci-dessus, qui prévoit la mise en place à grande échelle de mécanismes de CSC, est conforme à l’analyse de modélisation du potentiel des méthodes de CSC réalisée par Environnement Canada, selon les renseignements obtenus auprès du ministère.

[r] La répartition par secteur correspond à la structure du SCMI et n’est donc pas entièrement conforme à la répartition
par activité utilisée dans le Rapport d’inventaire national du Canada.